L’exposé du frère Guide devant les intellectuels et les penseurs africains sur sa vision stratégique pour une révolution culturelle africaine, visant à sauvegarder les fondements de l’identité africaine, avec son ancrage historique et son patrimoine civilisationnel d’avant l’histoire.
Mes salutations à mon frère Abdoulaye Wade, ses collaborateurs et les membres de son gouvernement rassemblés dans cette salle… Je salue également le peuple sénégalais frère ainsi que toute la nation africaine, à travers votre pays le Sénégal.
Je voudrais tout d’abord vous exprimer mon appréciation pour le discours que vous avez prononcé à l’ouverture de cette réunion…Je salue notre frère, Président Alfa Omar Konaré, président de la commission africaine, et je le remercie pour ses aimables paroles à mon égard dans son discours inaugural d’hier. Mes remerciements vont également à tous les leaders africains qui ont assisté à la séance d’ouverture de cette réunion, même ceux qui n’ont pu être présents aujourd’hui, ainsi que mes frères intellectuels africains.
Je suis particulièrement honoré de votre présence, et de votre réponse à l’invitation de mon frère Le président Waes, cet illustre professeur et intellectuel, opposant et révolutionnaire qui dirige l’opposition populaire qui est parvenue au pouvoir au Sénégal. Il est également bien placé pour comprendre les intellectuels, leur message et leur rôle.
Je lui suis grès de son idée, que j’ai appuyée à Lomé car je suis convaincu qu’elle est utile, émanant d’un personnage soucieux du devenir de l’Afrique. Il est de bonne augure qu’à la tète de La Commission Africaine, on trouve un historien et un penseur de la trempe du Président Konaré. Je m’exprime ainsi car la culture est le problème qui se pose le plus au tiers monde…Les gouvernants non- cultivés sont la cause principale du sous développement du tiers monde, de son retard dans le domaine de la démocratie et de son manque de stabilité. La culture est un facteur crucial dans tout œuvre de leadership.
En fait, je suis grandement attire par cette idée, cette présence et ces réunions. D’autant plus que les participants sont venus de contrées lointaines du monde. C’est une source de fierté pour l’intellectuel africain et une preuve de leur attachement à leur nation. Ces intellectuels de la diaspora sont dispersés dans différents pays du monde mais ont su conserver leurs attaches avec leur continent africain et sont réunis ici aujourd’hui pour lui, afin de le servir, de travailler pour son unité et le pousser de l’avant afin de le sortir de son retard du à des facteurs exogènes. C’est un motif de confiance dans la personne africaine, qui reste engagée envers sa nation quel que soit le lieu où il vit.
Je regrette de n’avoir pu être présent pour des raisons bien connues à mon frère Abdoulaye. J’aurais tellement aimé être parmi vous, mais je me contenterai, à travers cette intervention, de vous exposer certaines conclusions sans être trop long. Je vous les soumets pour que vous puissiez les intégrer dans votre programme…Vous savez que vous êtes toujours les bienvenus en Libye, soit en personne ou à travers vos représentants.
Je considère que l’Afrique est en voie d’unification. Elle veut se faire une place au soleil et sur terre parmi les nations du monde, après toutes les humiliations et les mauvais traitements qu’elle a subis…Un traitement d’esclave de la part des blancs occidentaux et racistes…Votre tragédie est connue…Vous faites face à un problème de langue alors que nous sommes entrain d’édifier l’Union Africaine…C’est un problème aigu, complexe et fondamental…
Nous, nous avons deux catégories de langues; une populaire et l’autre officielle…Celle-ci est la langue du colonisateur anglais, français, portugais etc.…L’autre est représentée par les langues que nous parlons en Afrique; à savoir tous les dialectes en usage et dont le nombre varie entre 800 et 1000. La langue officielle est une langue écrite qui a un alphabet…Les langues africaines authentiques sont d’expression orale…Parmi les problématiques qui se posent à nous est que les langues populaires africaines se divisent en deux : Celles des ancêtres qui ne sont pas écrites et qui n’ont pas d’alphabet.
Nous nous devons de résoudre ce problème car ces langues ne peuvent être transcrites dans l’alphabet occidental…On ne peut utiliser le caractère latin pour l’écriture des langues africaines car il les défigure…c’est une option qu’il faut exclure, car toutes les langues qui ont eu recours au caractère latin ont été affectées négativement au même titre que le caractère lui-même. Ces langues n’ont pu assimiler ces caractères, et leur capacité d’expression s’en est trouvée diminuée, comme c’est le cas pour la langue turque et d’autres qui ont adopté le caractère latin. Alors que les caractères chinois, japonais et arabe se sont parfaitement intégrés et adaptés à ces langues.
Si on avait transcrit la langue arabe en caractère latin, nous aurions sacrifié le sens et la beauté de cette langue, ce qui équivaudrait à un vrai gâchis… Nous nous devrons d’exclure totalement le caractère latin, mais nous devons, aussi et surtout, prendre soins de notre langue maternelle, et c’est la tache des érudits et des intellectuels africains à l’intérieur comme à l’extérieur et de la diaspora comme de ceux qui sont restés dans leur pays…Comment écrire nos langues africaines et les unifier en une seule langue. On ne peut pas avoir 800 ou 1000 langues. Dans laquelle allons nous éduquer nos enfants?
Nous devons choisir trois ou quatre langues dominantes et nous faisons en sorte à ce qu’elles soient fortement diffusées et utilisées dans les écoles africaines et intégrées dans les programmes scolaires en les imposant même aux états. C’est le vœu des africains. Aucun gouvernement ou gouvernant ne devrait avoir l’occasion de dérober à ses engagements dans ce sens…La langue est d’une importance vitale, car nous nous pouvons pratiquer nos rites religieux, communiquer notre culture, exprimer notre art, musique ou folklore que par le biais de la langue de nos ancêtres. La perte de ces langues nous couperait de notre héritage, notre histoire et nos racines…Je vous prie de trouver une solution à cette problématique. Certains dirigeants africains proposent de diffuser et disséminer le Swahili, l’Arabe, le Haussa et l’Amharique et en même temps continuer à enseigner les dialectes locaux, et les utiliser au sein des familles et dans les sociétés. C’est une problématique à résoudre, et je vous prie d’y prêter l’attention nécessaire, autrement nous allons perdre notre histoire et nos racines…
La deuxième problématique est celle de la religion…comment pourrait on prétendre que l’Afrique n’a connu Dieu que grâce à la colonisation occidentale…après avoir embrassé le christianisme…C’est une lecture malhonnête et honteuse de l’histoire et vous le savez très bien…Comment l’Afrique a-t-elle pu découvrir Dieu après la conférence de Berlin de1885 seulement ?
L’Afrique a eu son Dieu avant cette conférence et avant la construction de Berlin, et avant même que l’Europe soit peuplée…J’ai mené une étude sur le déisme en Afrique et les religions africaines et j’ai conclu que les religions, dites animistes, en Afrique ne le sont pas. Ce sont des religions monothéistes révélées, dont l’origine est la religion d’Abraham paix soit sur lui, premier prophète, musulman et nullement non-croyant…Les religions africaines sont des religions monothéistes, divines.
Il apparaît qu’il y a eu révélation, des prophètes et des messagers envoyés en Afrique depuis des temps immémoriaux. La comparaison que j’ai faite entre les religions africaines et l’islam démontre une grande compatibilité entre celles-ci et l’islam…Les noms glorieux de Dieu, révélés dans le Coran existent également dans les religions africaines. Parmi eux, l’unique, le majestueux, le créateur, l’éternel, etc.…
Ces noms de Dieu, ont leurs équivalents exacts dans les religions africaines. « Ould Mari » en Yoruba au Nigeria, est le synonyme de L’Unique, l’Éternel, le Majestueux…
« Aris » Chez les Yoruba veut dire la seule source d’existence, l’équivalent du premier créateur, ou du créateur qui n’a pas été créé chez les Lubin. « Juba » pour les Tambovka au Malawi veut dire le Donateur, « Kajenjou » en Ouganda équivaut au Maître de l’Univers, et « Rushubura Fouz » au Burundi, veut dire le Maître du Jour Dernier que nous adorons et que nous sollicitons, « Nyakalaja » pour les tribus Lu au Kenya équivaut au terme Éternel, « Wak » en Éthiopie veut dire Dieu des cieux, « Soussa » pour les Zala en Éthiopie a le sens du Maître de l’Univers, « Mendie » au Mandy, Sierra Leone équivaut au Grand Créateur et ainsi de suite. Nous n’allons pas passer en revu tous les Noms glorieux de Dieu qui sont au nombre de 99, et qui ont tous leur équivalent dans les religions africaines. Ceci d’un point de vue linguistique.
Pour la religion, nous devons opérer un retour à notre religion africaine, que d’aucuns appellent la religion de la jungle. Soit, nous avons besoin d’une révolution culturelle qui nous rendra notre langue et notre religion monothéiste. Je suis croyant musulman et en toute responsabilité je confirme que le retour aux religions africaines nous mènerait à une religion pure, qui ne connaît pas la multiplicité des dieux. C’est une honte qu’on vous accuse de n’avoir découvert Dieu que grâce au colonisateur…Ils prétendent que c’est eux qui nous ont fait connaître Dieu, le Christianisme.
Après avoir traité de la religion et de la langue, on passe à d’autres sujets qui ne sont pas comparables mais qui revêtent néanmoins un intérêt.
Il s’agit du logement africain, la hutte africaine en fait. J’aimerais que les intellectuels et les ingénieurs africains élaborent un projet pour sauvegarder la hutte africaine, qui ne devrait pas disparaître. J’espère que le ciment et le ciment armé ne nous envahissent pas, car les constructions utilisant ces matériaux sont plus adaptées aux pays scandinaves, aux esquimaux, au Groenland et l’Alaska qu’à l’Afrique.
La hutte africaine est l’habitat qui est le mieux adapté au climat, à l’environnement et aux traditions africaines. Elle est très saine, coûte très peu et requiert des matériaux locaux. En plus les familles elles-mêmes sont capables de les construire. Nous avons vécu dans ces huttes des centaines d’années durant sans aucun problème. Au contraire nous avons toujours été en bonne santé grâce à ces logements, qui ne nécessitent ni système d’aération, car l’aération y est naturelle, et encore moins des climatiseurs que nous devons acheter à l’Europe, et qui requièrent du gaz pour fonctionner.
Je vous prie de préserver la hutte africaine, et de mener des études sur l’environnement et l’héritage afin de sauvegarder ce symbole. J’ai voyagé par route, et j’ai visité un grand nombre de villes et village à l’ouest, l’est, le centre et le sud de l’Afrique, où j’ai passé du temps avec des familles et je me suis entretenu avec les gens. J’ai constaté que chacune de ses familles avait une hutte de séjour, une hutte servant de cuisine et une autre de basse-cour.
Lorsque j’ai demandé à l’un de mes interlocuteurs s’il acceptait une voiture comme cadeau, il m’a répondu qu’elle n’a aucune utilité pour lui. J’ai insisté en disant que c’est une voiture luxueuse, il a rétorqué qu’il n’en a pas besoin et qu’il est bien établi et stable chez lui, sans jamais exprimer le désir de savoir quel genre de voiture je lui offrais (Mercedes, Cadillac, krysler ou autre). Je lui ai dit : Bon si on te construisait une route goudronnée, changerais-tu d’avis? Il m’a répondu :
pourquoi une route ? Laissez la terre en l’état. J’ai des arbres fruitiers, je cultive la terre, et j’ai quelques animaux domestiques qui vivent dans cette nature. S’il pleut et si j’ai besoin d’eau, la rivière est toute proche. S’il ne pleut pas, je marche un peu pour m’approvisionner en eau et c’est très bon pour la santé. Donc je n’ai besoin ni de voiture ni de route asphaltée. J’en ai conclu que si nous construisons en dur, nous traçons des routes et nous introduisons les voitures dans ces régions, nous transformerons la vie de ces gens en enfer. Je vous prie donc de préserver la hutte africaine.
J’espère que cette rencontre historique parviendra à des résultats concrets pour sauvegarder notre culture, notre religion, notre hutte et nos traditions vestimentaires africaines. J’espère que l’habit africain ne cédera pas la place à l’habit européen. Leur climat et leurs habitations sont différents des nôtres. Ils voyagent par train, utilisent des satellites alors que nous voyageons à dos d’animaux. Lorsque nous serons à même d’envoyer nos cosmonautes africains nous leur ferons mettre des combinaisons de cosmonautes, mais pour l’instant nos enfants, nos femmes et nos personnes âgées doivent préserver les habits et les costumes africains, qui sont adaptés au climat et à l’environnement africains. Notre religion et notre langue ainsi que notre habitat ont déjà été défigurés. Alors évitons que cela s’étende à notre tenue vestimentaire, puis notre cuisine et le tout le reste…
Notre cuisine africaine doit être préservée. Nous ne devons pas être attirés par les plats européens et les recettes américaines et nous ruer vers leurs restaurants pour manger des cafards, des grenouilles etc.…Eux s’accommodent de ses mets qui n’ont aucun rapport avec nos plats africains. Nous en mourrons. Lorsque je participais à un cours de formation en Angleterre, en 1966, alors que j’étais lieutenant dans l’armée, j’ai entendu des gens qui recommandaient à leurs enfants de ne pas manger la viande de porc pendant les mois de Mai, Juin, Juillet et Août. Pourquoi donc ? Ces quatre mois constituent la saison d’été, où la viande de porc est néfaste. Par conséquent si on mange cette viande dans nos pays chauds, les conséquences seraient désastreuses. La médecine peut confirmer ceci, comme le confirment les Européens eux-mêmes.
La cuisine et les plats africains nous sont adaptés et sont conformes à nos conditions climatiques, notre environnement. Ils sont à base de la chair et de lait de nos animaux, des récoltes de notre terre, et des fruits de nos arbres. J’espère qu’ils ne viendront pas nous priver de nos habitudes vestimentaire et culinaire, de nos rites religieux et de nos langues pour nous enlever en fin de compte notre identité.
J’espère que l’Afrique aura un cadre de référence stable…J’ai un site web dont je vous donne l’adresse : www.Kadhafi.org, en arabe, français et anglais. Je consigne et je publie toutes mes idées et mes pensées sur ce site. Il contient mes écrits sur le cadre de référence et la stabilité en Afrique.
L’Afrique a besoin d’un cadre de référence et de stabilité. Vous savez que ce continent est passé par la période de libération sous la houlette de dirigeants historiques tels que Nkrumah, Ben Bella, Nasser, Nyerere, Lumumba, Modibo Keita, Kenneth Kaunda et autres…Ces leaders ont libéré leur peuple du joug du colonialisme sur la base d’un programme révolutionnaire de libération qu’ils ont essayé de mettre en œuvre.
Ils ont commencé par créer L’Organisation de l’Unité Africaine dont ils sont les pères fondateurs. Le colonisateur a fomenté des complots contre ces dirigeants afin de les remplacer par ses agents et collaborateurs… Nkrumah et Modibo Keita ont été effectivement renversés, alors que Lumumba fut assassiné. Ils ont ourdi 60 complots contre Nasser, 40 contre Sékou Touré. Je ne voudrais pas entrer dans les détails car ce sujet et trop sensible…L’essentiel est que l’Afrique a connu son âge d’or sous ces dirigeants. Ils ont fondé L’OUA et ont été l’incarnation même de la volonté de s’affranchir et la détermination de s’unir. Le colonisateur a comploté contre eux et les a renversés.
Après cette phase, l’Afrique est entrée dans l’ère des coups d’état militaires…Ceux qui ont pris les pouvoirs en Afrique alors étaient des militaires qui n’étaient versés que dans les sciences militaires. Parfois ils n’étaient que des sous-officiers qui se sont promus eux-mêmes.
Le leadership s’en est trouvé très diminué dans notre continent…Cette classe de nouveaux dirigeants ne connaissent rien à la politique, l’économie, le social, la bureaucratie, la routine administrative, la gestion ou les sciences…L’Afrique s’est tournée en dérision pendant cette période de coups d’état, dont j’étais témoin, et qui n’ont rien apporté à notre continent excepté l’instabilité.
Après ça, ce fut la phase du multipartisme et des élections. Les coups d’état militaires sont similaires aux élections. Cette période a été également caractérisée par le manque de continuité et de stabilité. Tous les quatre ans un nouveau président est au pouvoir.
Nul ne peut mettre en œuvre son programme électoral. En plus il y a la limitation du nombre des mandats par la constitution à deux uniquement. Supposons que le Président fait du bon travail. Pourquoi empêcher le peuple de le réélire plus de deux fois ? Surtout si le peuple le veut…On doit lui ouvrir la voix et je pense que les constitutions en Afrique doivent être amendées afin qu’elles ne contredisent pas la volonté des peuples…La constitution doit permettre au peuple d’élire son président autant de fois qu’il le désire. Pourquoi priver le peuple de l’action d’un bon président qui a un bon programme et qui veut vraiment le mettre à exécution ?
Souvent ces présidents sont obligés de se démettre pour un autre qui, non seulement à un programme différent mais pourrait détruire totalement l’œuvre de son prédécesseur. Les élections ne nous ont pas profité et elles n’ont pas apporte la stabilité escomptée…Le multipartisme est une formalité et une exigence de l’occident et des institutions internationales telles que la Banque Mondiale, l’OMS, le FMI, l’Union Européenne et les États-Unis…C’est leur condition pour fournir aide et assistance…Un multipartisme imposé n’en est pas un…Il n’y a pas de multipartisme aux États-Unis, pas plus qu’en Grande Bretagne, en Italie ou en Espagne…Ont-ils tous adoptés le système du parti unique ? Les États-Unis sont gouvernés par un seul président et un parti unique sans rival. Il n’y a, en tout et pour tout, que deux partis aux USA. Les autres ne font que de la figuration et sont de simples forums.
Que dire donc de l’Afrique ! Ce continent n’a pas une tradition de partis. Nous sommes des tribus, plus proches du système Jamahyrien; populaire…Plus proche des congrès et des comités populaires que des partis classiques. Nos peuples ne connaissent ni les partis ni même les élections… Prenons l’exemple de l’Égypte, pays indépendant depuis longtemps et de grande tradition. Lorsqu’ils ont institué les élections, on a demandé à un habitant de la vallée du Nil : Pour qui tu veux donner ta voie? Il a répondu : A Saad Zaghloul…personnalité morte depuis 1920. C’est lui qui a conduit la révolte de 1919, grâce à laquelle il est resté gravé dans la mémoire des gens…Imaginez donc un électeur qui veut voter pour une personne morte depuis longtemps…
Dans un pays africain voisin, ils ont distribué les photos des candidats afin que les gens puissent les connaître…Les gens ont accroché ces portraits chez eux… On leur a demandé : Comment ce fait il que vous n’ayez voté pour personne…Leur explication a été que leur conception des élections était d’accrocher le portrait de leur candidat préféré chez eux… Même les référendums ne sont pas adaptés à nos structures sociales…
En fait nous sommes entrés dans une deuxième phase d’instabilité en raison des élections et du multipartisme…Après l’échec de cette phase, nous avons entamé la phase des rebellions…Les coups d’état, puis les élections puis les rebellions…Chaque fois qu’un président est élu, il fait face à des rebellions avant la fin de son mandat. Les exemples sont nombreux…En Cote d’Ivoire il y a un président élu qui fait face à une rébellion.
Au Liberia, le président élu a été renversé, ainsi qu’en Guinée Bissau et à Sao Tome et Principe…Celui-ci a été réinstallé grâce à la CEDEAO…Le Président élu de la République de Centrafrique a été renversé et est maintenant réfugié à l’étranger…On voit d’autres rébellions au Soudan, au Tchad, au Burundi, au Rwanda, en Ouganda…Les élections n’ont donc pas apporté de solutions.
Nous avons besoins de stabilité, et la stabilité doit mener à la continuité dans la direction politique des affaires…Le pouvoir doit émaner du peuple par le biais des congrès et des comités populaires…C’est la constance…Le peuple est la constance…lorsqu’il est représenté par les congrès et les comités populaires…Il y aussi la question du cadre de référence en cas de défaillance comme au Sierra Leone, au Liberia et en Centrafrique….On a besoin d’un cadre de référence…Dans certain pays du monde, il y a des rois qui n’exercent aucun pouvoir exécutif, législatif au autre…C’est un cadre de référence…Il tranche en cas de litige entre les différents pouvoirs…Après les élections il approuve les résultats des élections en apposant sa signature…
Un cadre de référence est une nécessité, qu’il soit une personne, une institution au autre… C’est ce qui nous manque…Des rois et des présidents à vie comme se fut les cas en Afrique juste après l’indépendance…Tous les pays européens et les autres pays du monde ont un cadre de référence, incarné soit par un roi ou un président à vie, n’exerçant aucun pouvoir législatif, exécutif ou judiciaire. Sa seule fonction est de trancher en cas de différend et concilier…Il y a, en plus, la Haute Cour, la Cour Suprême, la Cour Constitutionnelle ou la Cour d’état dont les décisions sont contraignantes…Nous, on ne peut avoir une institution pareille, neutre, immuable et dont les jugements sont contraignants. Chez nous, Les gouvernements créent des tribunaux qui leur sont acquis. Nous n’avons pas atteint le niveau ou l’on respecte les tribunaux et leurs jugements, d’où la nécessité d’un cadre de référence.
Afin d’établir un lien entre le continent mère et vous, membres de la diaspora, il doit y avoir un ministère unique des affaires étrangères, un seul ministère de la défense et une seule communauté économique…bref, une position commune lors des négociations…Le Président Wade a dit hier : Lorsque les sociétés étrangères ont demandé des permis de prospection pétrolière au Sénégal, il ont exigé 85% des revenus, contre 10 à 15% pour le Sénégal. L’état a refusé en arguant que pour de telles conditions il est préférable que le pétrole reste dans le sous-sol pour les générations futures, qui seraient peut être dans une meilleure position pour négocier.
A ce moment la situation sera renversée et l’état obtiendra 80% contre 20 ou 15% pour les compagnies étrangères. C’est une attitude saine et correcte. Il vaut mieux que le pétrole reste en l’état que d’être pillé par les sociétés étrangères. C’était la situation en Libye avant la révolution et qui s’est renversée après. Le problème est qu’aucun état africain n’est en position forte de négociation.
Quel est le poids de la Libye, du Sénégal, de la Gambie, du Malawi ou du Burundi devant les géants américain, européen chinois, les blocs du Sud Est Asiatique ou de la Communauté des États Indépendants. Nous ne pouvons négocier avec eux qu’à partir d’une position africaine commune. Et elle ne sera possible que lorsqu’on a un ministère des affaires étrangères et du commerce extérieur communs. Les douanes seront unifies d’eux- mêmes. Les marchandises entrant en Libye paieront les mêmes tarifs douaniers que celles pénétrant les marches de l’Afrique du Sud.
Grâce à un ministère des affaires étrangères africain unique les contacts avec vous seraient plus faciles. Tout est lié. L’économie, le commerce extérieur, la politique étrangère et la défense…J’espère que vous exprimeriez votre soutien à ces idées, et que vous exercerez la pression sur vos gouvernements respectifs afin de les mettre en œuvre.
Au moment de la création de l’union africaine, j’ai proposé l’idée d’un congrès africain, qui sera, en fait, un prolongement des congrès nationaux africains, qui ont conduit la lutte pour la libération dans plusieurs pays africains, tel que l’ANC en Afrique du Sud, la SWAPO au Zimbabwe. C’est de cette expérience que je me suis inspiré cette idée du congrès africain qui sera semblable au congrès américain. Il aura la compétence de promulguer des lois afin de faire de la nation africaine, du peuple africain la source du pouvoir. Les membres de ce congrès seraient des citoyens ordinaires. Malheureusement ils ont crée un parlement consultatif sans pouvoirs ni autorité. J’espère malgré tout que ce parlement se développe en vrai congrès africain. Pourquoi craindre une telle institution ?
Vous les Africains de la diaspora, avez d’énormes occasions de réussite. Vous pouvez occuper d’importantes fonctions aux États Unis, en Europe, en Amériques Latine ou Centrale. Cependant, je constate qu’aussitôt qu’un africain (noir) atteint ce niveau, il oublie ce qu’on attend de lui et devient plus américanisé ou européanisé que les Américains ou les Européens eux-mêmes. En bref plus royaliste que le roi. Pourquoi leur faire plaisir ? Nous avons un bon exemple devant nous. Les juifs américains sont fanatiquement attachés à l’état qu’ils ont crée unilatéralement en 1948 et qu’ils ont appelé Israël. Ils mettent toutes les capacités et les moyens américains au service de ce minuscule état sans pour autant abandonner leur citoyenneté américaine, leur allégeance aux États Unis ou recourir au terrorisme, la violence ou la force…Ils sont chauvins mais utilisent ce chauvinisme au service de leur patrie ou la terre promise comme ils l’appellent… Pourquoi ne pas faire de même ? Lorsqu’un « noir » occupe une haute fonction aux États Unis ou en Europe, il doit mettre ses compétences au service de la mère patrie, l’Afrique. Nous devons crever cet abcès. Nous devons dire la vérité et soumettre cette question à discussion même aux États Unis. Pourquoi le noir doit toujours garder un profil bas aux États Unis ? Ce n’est pas le pays des seuls blancs. C’est le pays de tous. L’Américain c’est toi, moi et l’autre. Lorsqu’on est aux États Unis, on est américain. Il n’y a pas de race ou communauté américaines. Les Américains c’est un mélange d’Africains, d’Indiens, de Chinois, d’Européens et de tous ceux qui ont émigré. L’Amérique en tant que continent est la terre des indiens qui ne sont ni Yankees ni blancs. Les Indiens ont émigrés d’Afrique et d’Asie. Les Phéniciens qui sont allés en Amérique les ont appelés Indiens alors qu’ils ne le sont nullement. C’était une erreur, car ils avaient cru que cette terre qu’ils avaient atteinte était l’Inde. Ils ont remarqué la couleur de la peau des habitants et les ont appelés les “indiens rouges”. Cependant, ils ne sont pas indiens. Ce sont les vrais habitants d’Amérique; ceux qui ont droit à cette terre. Les autres n’ont aucun droit à monopoliser le pourvoir et la richesse. Tous sont égaux en Amérique; noirs, blancs, jaunes et de métisses. Les États Unis est un produit mondial; de tous les peuples. Par conséquent il revient à tous. Je n’ai aucune honte à réclamer ma part en Amérique. Nous connaissons tous les conditions dont nos ancêtres sont arrivés là bas.
Pourquoi le noir doit courber l’échine devant les blancs et les Yankees afin qu’ils l’acceptent ? Ce n’est pas de leur ressort de l’accepter ou non. C’est le noir qui les menace lorsqu’il n’est pas satisfait car il peut réclamer la sécession et la vengeance puisqu’ils l’ont transféré de sa terre natale comme est transporté le bétail, pour le faire travailler comme esclave. Ils en ont jeté des millions à la mer et nous ont évalué par la force de nos muscles tels des ânes ou des mulets. Nous avons enseveli leurs marécages, et construit les routes et les chemins de fer. Nous avons édifié l’Europe et l’Amérique.
C’est eux qui devraient nous faire plaisir vu les atrocités qu’ils ont fait subir à nos ancêtres. Ils croient que nous allons continuer à nous taire, satisfait, oubliant l’esclavage, et ceux qu’ils n’ont pas hésité à jeter à la mer, pour un fait de rébellion ou maladie. Ils croient que nous avons oublié qu’ils nous chassaient par les filets. Non, nous n’oublierons jamais. Allez voir le film Racines (Roots) qui raconte toutes ces atrocités.
J’ai d’autres brèves remarques à faire. J’appelle les intellectuels africains à lire le Livre Vert, l’étudier en profondeur et faire en sorte à appliquer les idées qu’il contient. Ceci nous évitera les faux pas alors que nous essayons de construire l’Afrique sans expérience, en important des modèles politiques, économiques et sociaux qui ne nous sont pas adaptés. Je vous prie de lire le Livre Vert afin qu’on opère un retour au pouvoir du peuple.
Je prie mes frères les présidents Wade et Konaré à aider nos frères de la diaspora à la création d’un organe de contact…Malgré l’attachement des juifs de la diaspora aux pays qui les accueillent, ils n’ont jamais cessé de servir ce qu’ils considèrent comme leur mère patrie. Nous devons, nous africains, suivre leur exemple. Partout où nous sommes, il est de notre devoir de profiter de notre situation pour servir notre continent.
J’espère que vous allez envoyer un appel pressant pour l’édification des États Unis d’Afrique. Certes, on peut arguer que les pays africains sont nombreux, d’où la difficulté de les unir. Au contraire nous sommes de la taille d’un seul grand pays. Nous constituons une seule et même nation, de par notre race, couleur, religion et identité. Il n’y a pas de race ethnique en Afrique. Même les arabes installés en Afrique du nord sont devenus africains par la force des choses… Certains d’entre eux, les arabo-berbères qui sont là depuis 5000 ans, et les arabes venus après l’avènement de l’islam, vont tous finir par avoir la peau noire. Une multitude de communautés arabes se sont installées en Afrique et se sont fondues dans la nation africaine, à l’instar des communautés indiennes et indonésiennes qui sont devenus africaines… Vu tous ces facteurs d’union, il nous faut avoir des ministères communs afin d’accélérer le processus d’édification des États unis d’Afrique…Il y a aussi le problème de la fuite des cerveaux. Nous envoyons nos enfants faire leurs études mais ils ne reviennent jamais. Les sociétés qui peuvent bénéficier de leurs compétences sont la bas et pas chez nous. C’est une énorme perte pour nous. Nous éduquons nos enfants pour le bien du colonisateur. Ils partent pour compléter leur enseignement et restent sur place… Nous nous devons de résoudre ce grave problème. Le premier pas est que vous réunissiez et absorbiez ceux qui sont déjà partis.
Vous devez les adopter afin que leurs études profitent au continent africain, à leur tribu et à leur famille qui les ont éduqués et qu’ils ont laissées tomber pour mettre toutes leurs capacités et leurs compétences au service de pays étrangers et colonisateurs. Pensez y. Vous devez les intégrer dans un organe, forum ou association. Le nom importe peu. En Australie et en Amérique du Nord et du Sud, les africains sont des autochtones dominés par les blancs. Cette situation doit s’arrêter. Pourquoi devons nous être étrangers aux États Unis, en Grande Bretagne, en Australie et aux Îles Canaris alors que nous en sommes les habitants d’origine.
Je voudrais qu’on s’inspire de notre histoire, notre civilisation et nos gloires pour relever les défis du présent et regagner la confiance. Nous ne sommes ni des esclaves ni des bêtes. Nous avons connu Dieu avant eux et notre civilisation est plus ancienne que la leur. Il suffit de nous rappeler l’empire des Yuruba, du Congo, du Bakuba, du Dahomey, du Mali, du Marwa qui datent d’avant le Christ, et celui du Fouju, d’Amhara et du Te Gray, le royaume de l’Ashanti, du Funti, du Savannah et du Kitara et enfin le grand empire des Zulus. Toutes ces nations et ces peuples étaient civilisés et ont laissé des vestiges, des monuments et des œuvres d’art qui en attestent. Nous sommes une nation qui n’a jamais connu de totems. Notre religion a toujours été monothéiste, sauf l’Ashanti ou on a trouvé des traces de totems.
Je salue ce grand rassemblement et vous exprime toute ma fierté. Je vous tends ma main en guise de solidarité et d’appui. Votre pays la Libye se tient à votre disposition et à votre service. Je salue également mon frère Abdoulaye Wade, ce grand dirigeant et intellectuel et mon frère le professeur Konaré qui ont été à l’origine de cet œuvre que nous n’avons fait que soutenir.
Dernière observation : J’ai demandé une fois à tous les leaders africains quel est le pays d’origine de Gabriel qui a été condamné à mort et exécuté en 1800 car il a mené une rébellion de noirs contre l’esclavage, en attaquant la ville de Richmond avec des milliers d’esclaves. Son objectif était d’établir un état indépendant pour les noirs. Mais il a été capturé et exécuté. Le Livre Vert préconise que les noirs domineront le monde. Je voulais connaître son pays d’origine afin de lui construire un mémorial à l’occasion de du 200éme anniversaire de sa mise à mort. Je n’ai pas eu de réponse jusqu’à présent. Je vous prie de me chercher une réponse afin d’immortaliser la mémoire de ce grand personnage en Afrique.
Je vous remercie. Vive l’Afrique, vive les États Unis d’Afrique. Et la lutte continue.